« L’idéal, ce serait que ça se mette en place dans le bordel », adresse-t-on depuis le premier rang à la troupe en pleine répétition sur la scène de l’espace Gérard Philipe. Inconsciemment, la phrase résume l’essence de STAFF : un télescopage inopiné d’auteurs, de compositeurs et d’interprètes francophones, rassemblés l’an passé pendant dix jours au sein de Voix du Sud – l’association créée par Francis Cabrel en son fief d’Astaffort il y a 25 ans – au terme desquels devait être mis au monde un répertoire collectif totalement original.
Ce projet, qui affiche aujourd’hui une santé éclatante, a cette fois transfiguré ses limites initiales pour aboutir à la création d’un album éponyme qui sort le 26 octobre. De Valentin à Stellia en passant par Thomas, les résidents de la session 2017 sont unanimes : leur aventure doit tout à Cabrel, qui a eu pour eux un véritable coup de cœur au point de les soutenir pendant l’enregistrement du disque et d’y glisser un peu de voix dans les chœurs par-ci, une note de guitare là. Soit pour Pascal, le directeur de Voix du Sud, l’effet précisément recherché : « STAFF, c’est la magie d’une rencontre : des artistes d’horizons différents qui mettent leur ego de côté au service d’un projet. A Astaffort, ils viennent vivre quelque chose de particulier ».
Thomas, qui a dirigé la réalisation de l’album, n’avait en rien prévu tout ce qui allait se passer. « Si on m’avait dit qu’on irait jusque là ! L’expérience te retourne et te grandit ». Stellia ne le démentira pas : pour cette étudiante à Sciences Po qui fut choriste sur un album de Cabrel, « c’était un challenge suffisamment loin de mon univers pour me faire douter face à autant d’artistes confirmés, mais les connexions se font. A la fin, on fonctionnait comme une petite famille. On s’est tous fait des potes ! » avoue-t-elle dans un éclat de rire. Pour l’heure, à deux jours de ce premier concert, chacun travaille encore sa place et ses effets sur scène, mais l’ossature est déjà solide.
Jeudi, le grand soir. Sur scène, STAFF fait bloc. Armé d’un registre qui, s’il suit les sentiers bien connus de la chanson française, offre un son boisé et quelques échappées électriques, il se donne les moyens, dès son premier morceau, de capter l’œil et l’oreille d’un public qui ne sait rien d’eux. Puis enchaîne avec Comme en exil, tube plus que potentiel, pour le mettre pour de bon dans sa poche. Entre eux, aucun leadership, chacun endossera à tour de rôle le costume de frontman pour aller se baigner dans la lumière du milieu de scène, le tout sous le regard de leur parrain Francis venu assister à cette prestation déterminante.
L’après ? Depuis Astaffort et le disque, les liens comme l’envie restent vigoureux. Les uns travaillent sur les projets des autres. Thomas a plus que jamais envie de se consacrer aux arrangements, de « rendre les morceaux plus beaux ». Stellia se sent aujourd’hui « un peu plus chanteuse » : sans oublier ses études, elle cultive sa passion du chant à travers les chorales pour transmettre ce qu’elle considère comme une source de bien-être. « Pourquoi pas une session Astaffort bis ? » souffle-t-on en coulisses. Et dire qu’il y a un an ils ne se connaissaient pas...
Virgile Gauthrot