Pour accompagner les jeunes choristes cette année, ce sont près de 27 professeurs de musique qui animent l’apprentissage des 4 répertoires mis à l’honneur. Trois d’entres eux ont répondu à nos questions : Virginie FERREIRA, Mickaël DI MAGGIO et Geneviève METRICH. A eux trois, ils réunissent plus d’une centaine de collégiens choristes.
Virginie Ferreira (Collège Marie Curie à Troyes) :
- Les collégiens découvrent les 5 chansons choisies et les chefs de chœur juste avant les grandes vacances en juin, lors d’une première grande répétition à l’Auditorium du Centre des Congrès de l’Aube. 27 collèges participent cette année à cette aventure. La répétition permet aux jeunes artistes d’apprivoiser les mélodies et a pour but de leur donner envie d’écouter les enregistrements MP3 pendant l’été avant que nous, professeurs en collège, prenions le relais en septembre.
Les répétitions de la chorale commencent dès la première semaine de rentrée de septembre. Elles ont lieu deux fois par semaine de 13h à 14h. Chaque répétition est ponctuée par des exercices de respirations et des mouvements du corps pour éveiller le système nerveux, libérer les tensions et favoriser la sensation du sol. Ce jeu avec le corps est accompagné d’exercices vocaux en lien avec les chansons à travailler, le choriste reste donc mobilisé corporellement tout au long de la répétition. L’apprentissage des titres est un travail qui demande concentration, rigueur et plaisir, c’est en ce sens que nous travaillons, mes collègues et moi-même. Se servir de sa voix et de son corps mais aussi interpréter, faire partager au public les émotions contenues dans le texte chanté pour vivre une aventure musicale et humaine des plus émouvantes et harmonieuses.
Geneviève Metrich (Collège des Jacobins à Troyes) :
- Nous avons peu de temps, il faut aller à l’essentiel. Je sélectionne donc des passages pour leur difficulté mélodique, rythmique ou littéraire. J’essaie de passer un maximum par le jeu et la détente pour décomplexer les enfants, on chante debout comme assis ou en marchant, on cherche l’expression et la musique dans le visage, la posture et l’attitude, on s’invente des histoires, on s’imagine des situations. Je réfléchis en amont à des moyens de contourner la difficulté, je me base sur ce qui est écrit dans le guide fourni par l’équipe artistique, mais j’improvise aussi beaucoup car parfois, on se rend compte que ce qui nous paraît être une difficulté ne l’est pas pour les enfants, et inversement. Les meilleures idées, ou du moins les plus efficaces, me viennent généralement sur le moment présent, face aux élèves. Pour ne pas les lasser, il faut savoir réagir vite et s’adapter, ne pas insister trop longtemps sur un passage délicat, les encourager et beaucoup les solliciter. Les adolescents aiment être "bousculés", il faut être à la fois très exigeant tout en s’amusant. J’alterne donc des moments de concentration extrême sur un temps assez court, quand on travaille par exemple la justesse, et des moments plus ludiques, dynamiques, suivis aussi de temps de repos pour permettre l’imprégnation.
Mais en six semaines, 45min par semaine, c’est le marathon. Les mp3 que nous avons à notre disposition sont un outil indispensable. Ils nous épargnent en fait le travail d’apprentissage à proprement parlé et permettent aux élèves de mémoriser rapidement les chansons.
Mickaël Di Maggio (Collège la Voie Châtelaine d’Arcis-sur-Aube) :
- Les choristes ont la possibilité de télécharger les morceaux avant les vacances de juillet. A la rentrée, je remets les morceaux sur un site qui leur est uniquement accessible (padlet). De ce fait, même les collégiens ne participant pas peuvent les écouter. Je travaille beaucoup en classe avec les enregistrements fournis. Depuis cette année, je travaille avec une méthode de boucle : je mets des passages en boucle, je chante l’exemple, les choristes répètent. De ce fait, ils sont constamment dans la musique.
Virginie F. :
- Les collégiens ont été surpris qu’il n’y ait pas un seul artiste invité comme les années précédentes, mais 4 artistes. Ils apprécient la légèreté et la joie embarquée dans la chanson Sister d’Emily Loizeau, ils aiment la poésie chantée dans L’amour en solitaire de Juliette Armanet. Ils se plaisent également à chanter Oh ! j’cours tout seul de William Sheller, mais attention à garder le bon tempo et veiller à bien articuler ! Par contre, beaucoup d’élèves ne connaissent pas la chanteuse Barbara. Il faut du temps pour rentrer dans son univers. Quand on chante du Barbara, il faut être précis. Tout son art repose sur l’alliage exact des mots et de la musique. Les collégiens vont tenter d’emmener le public vers les mêmes hauteurs émotionnelles que la Dame en noir.
Geneviève M. :
- Je n’étais pas à la répétition de fin juin. Des échos que j’ai eus, les enfants ont plutôt bien accueilli le répertoire, avec dans mon collège une nette préférence pour L’amour en solitaire parce que c’est la plus récente et qu’ils l’entendent dans les médias. Ils ont plus de mal avec les textes de Barbara et Sheller, ils ne sont pas faciles à comprendre pour eux et nous n’avons pas vraiment le temps de les décortiquer durant notre répétition de chorale. Ils en ont une vision globale, ils savent dans les grandes lignes de quoi ça parle mais je pense que certains passages leur échappent complètement.
Mickaël D. :
- Les chants sont toujours très bien accueillis. Cette année, je pense qu’ils sont plus attirés par Oh ! J’cours tout seul, car ils semblent beaucoup s’amuser à le chanter (rythme très entrainant) et Perlimpinpin, dont le texte semble les avoir beaucoup touchés. Je ne pense pas qu’ils aient une préférence pour un artiste plutôt qu’un autre.
Virginie F. :
- J’ai plusieurs souvenirs qui me reviennent en mémoire comme la présence de Louis Chedid, venu écouter les élèves lors du concert d’ouverture du festival en 2010, la générosité du groupe Tryo chantant avec les collégiens en 2013. Sans oublier de jolis moments polyphoniques, de partage et d’émotion avec notamment l’interprétation émouvante des collégiens sur L’envie d’aimer l’an dernier.
Mickaël D. :
- Les deux années que j’ai réalisées m’ont laissé un excellent souvenir. J’ai peut-être une préférence pour Pop sentimentale (Souchon/Voulzy) car je suis arrivé en septembre, j’ai été catapulté dans cette aventure qui avait déjà démarré en juin, je ne connaissais personne, ni même les choristes (car nouveau collège). Et j’ai reçu un accueil exceptionnel de la part de l’équipe qui m’a tout de suite mis dans le bain et aidé dans le travail à faire. J’ai également adoré le répertoire.
Geneviève M. :
- J’ai plusieurs très beaux souvenirs : comme chanson, Petit de Lavillier, qu’on a chantée en 2008. Il s’est passé quelque chose d’assez incroyable ce soir là qui me reste encore gravé dans la mémoire et même imprégné dans le corps. Il y avait énormément d’émotion dans le chœur (à cette époque les professeurs chantaient au côté des enfants) et dans la salle Argence. Je me souviens qu’au fur et à mesure, les silences dans la chanson et celui dans la salle se faisaient de plus en plus intenses, profonds, presque religieux, une sorte de prise de conscience collective. C’était tellement poignant que le public a mis plusieurs secondes avant d’ovationner les enfants, comme s’il lui fallait digérer ce qu’il venait d’entendre. Et je crois que c’était vraiment le cas. Cette interprétation m’a laissé des sensations indélébiles, c’est une chanson que je n’entendrai plus jamais de la même façon. D’ailleurs je l’ai très peu ré-écoutée depuis cette soirée.
Comme édition, mon meilleur souvenir restera celle avec Tryo (2013) car c’est la première fois depuis que j’ai participe à ce projet que l’artiste invité s’engage autant auprès des enfants. Je retiendrai de cette édition l’ambiance parfois un peu folle qui régnait, la bonne humeur et la joie sur les visages des enfants quand Tryo est arrivé. C’était une année très particulière, unique, avec de très beaux moments de partage entre Tryo, les enfants et le public dans une ambiance vraiment festive. C’était aussi une édition spéciale pour moi car j’étais alors au collège d’Ervy-le-Châtel et ce sont 3 de mes collégiens qui ont présenté la soirée, en compagnie de 3 collégiens des Jacobins. J’étais autant, voire beaucoup plus stressée qu’eux, ils ont été très professionnels et je dois dire que j’étais très fière de leur prestation.
Tryo étant un groupe que j’apprécie tout particulièrement, je dois dire que j’étais absolument ravie qu’ils soient les invités de cette édition et c’est aussi une des raisons qui la placera, je pense, toujours en tête de mes autres participations.