En cadette des marraines du festival Nuits de Champagne 2017, Juliette Armanet était très attendue sur la scène de la Chapelle Argence, déjà trop petite pour elle.
Comme ceux de Barbara, son ainée dont elle revendique la filiation, ils ont le regard fiers ses hommes qui, d’abord seuls en scène, au clavier, à la guitare, à la basse et à la batterie, lui déroulent un tapis en nappes electro enivrantes. Elle se hisse, s’y glisse souplement, et donne le ton : "je suis en manque d’amour tout autour de moi".
Alors elle multiplie les bonsoirs, serre des mains, vient se mettre en face de nous, "très très proche, hein". Elle convie même l’Alexandre de la soirée à partager l’intimité de son tabouret de piano, s’adresse à lui pour murmurer qu’il "est son dieu". Elle est comme ça, Juju, tendre et bravache à la fois ("sans détour et sans atour, j’aimerais faire l’amour avec toi") ; elle a tellement soif d’établir un contact vibrant.
Sa voix, son corps de scène, étrangement sont aussi érotisés qu’éthérés, et ses déhanchements fantasques, sa malice, n’ont rien à envier à la grande dame brune. Parfois des accords, des sonorités des années 70 et 80, colorent l’humeur d’une note rétro et pourtant, avec elle, tout a la fraîcheur d’une première fois.
Charmeuse et charmante, elle trimballe une mélancolie qu’elle a le secret d’avoir joyeuse. Cette drôle d’alchimie lui permet d’aborder les affres de l’amour, la passion, la fatalité amoureuse, comme personne n’ose dans sa génération. "J’ai explosé mon cœur contre toi… T’as apparu d’un coup comme la vie en personne." Et tout le monde écoute dans un silence religieux.
Car l’artiste a une foi, celle que "tout l’amour inassouvi s’effacera sous la pluie" ; dès lors, elle peut la danser, sa déca-danse. Elle n’est plus seule, Juliette, on est tous avec elle. Elle peut ondoyer en pythie facétieuse, en prêtresse pratiquant l’auto-dérision ("n’importe quoi !"), qui ne cesse pas de "lancer une bouteille à l’amour".
Thibaut G. -Le Troisième Œil